Dans la petite l’église de Saint Bruno à Bordeaux, de part et d’autre d’un tableau d’autel de Philippe de Champaigne représentant une ascension de la Vierge Marie, une statue de l’archange Gabriel serait de la main de Gian Lorenzo Bernini.
Bernin est le plus grand sculpteur de Rome au XVIIème siècle. Il fut l’artiste le plus sollicité par les papes. Il réalisa la colonnade de la place Saint Pierre et le célèbre baldaquin du maitre autel de l’église. Au plus fort de sa carrière, Louis XIV le fait venir par l’intermédiaire de Colbert pour concevoir un projet pour la nouvelle façade du Louvre, ainsi qu’une statue équestre du roi. Son projet ne fut pas retenu et la statue équestre fut reléguée loin dans un parc de Versailles, le goût français classique ne supportait pas les courbes et les effets de matières du baroque. De retour à Rome, Bernin conçut un chef d’oeuvre d’expression de la foi catholique, avec l’extase de Sainte Thérèse d’Avilla. Transposant dans le marbre la vision extatique de la sainte espagnole, cette sculpture reçut de nombreux commentaires, certains évoquant l’irréalisme des effets des drapés, d’autres comme ceux du psychanalyste Jacques Lacan ne voyaient dans la bouche ouverte de Saint Thérèse qu’une extase charnelle, comme l’expression de désirs inassouvis. C’est passé à côté de l’esprit du baroque. Bernin transforme la matière, il la transcende même, pour nous entrainer vers des sentiments plus élevés.
L’archange Gabriel de l’église Saint Bruno serait de sa main, une de ses premières oeuvres. Tout le corps de l’archange s’élance vers une autre sculpture, celle de la vierge pour lui annoncer qu’elle a été seule choisie parmi toutes les femmes. Le visage est empli d’un sentiment de joie profonde et de grande douceur. Les mèches des cheveux bouclés contiennent encore le souffle de sa descente sur Terre. Il s’apprête à parler, sa bouche s’ouvre. Bernin utilise très fréquemment ce motif d’une bouche qui s’ouvre. On peut comparer ce visage de l’archange avec celui d’une autre de ses sculptures. Le visage du dieu Apollon, transi d’amour, il est sur le point de saisir la nymphe Daphné. Elle lui échappe en se transformant en laurier. Le dieu ébahit et déçu, ouvre la bouche, le souffle coupé.
Sylvain Métot
Apollon et Daphné
Galerie Borghése Rome
Extase de Sainte Thérèse d’Avila
Eglise Santa Maria delle Vittoria, Rome
Un choix de photos de l’église Saint Bruno